par Doude le 27 mai 2015
  • Date de Sortie
  • Plate-formes
  • Développeur
  • 2 avril 2015
  • PC, OsX, Linux
  • Subterranean Games
 

War for the Overworld

Le clone triste.

Le monde de la surface est en proie aux flammes, l’alliance des Nains et des Hommes en déroute, privée de ses leaders, se déchire de l’intérieur et loin sous terre, les donjons des sombres Underlords prospèrent et grouillent de sbires prêts à en découdre une fois pour toute avec les forces du bien. Mais la victoire n’est pas encore acquise, et déjà des Seigneurs sombres jaloux de mon pouvoir s’en prennent à moi, avides de s’emparer de mon trésor…

Consolider mes positions et construire un réseau de pièges vicieux sera la première étape de… ah mais… nom d’un cultiste en slip, la mission n’a pas commencé depuis quarante secondes que leurs larbins ont déjà percé les murs et mettent le zbeul dans les couloirs de mon domaine ! Bon, pas le temps de faire de l’exploration, on va faire comme dans les missions précédentes et rusher la construction pour avoir les sbires les plus OP et aller casser le fion aux adversaires sans trop réfléchir…

 

Plongée dans les abîmes de l’Incrédulité

Ou le coup de gueule un peu verbieux mais nécessaire d’un gamer qui n’aime pas trop qu’on prenne les gens pour des jambons.

Cet antre des bêtes aux couleurs rosâtres pue le swag

Tout ça est très familier et plutôt séduisant, à première vue !

Lecteurs assidus du blog, vous connaissez déjà peut-être quelque chose de mon amour pour les simulateurs de salles de torture du Mordor et autres jeux de gestion d’empire maléfique, genre hélas infiniment sous-représenté et sous-qualitatif dans le paysage vidéo ludique. Aussi, quelle joie pour mon petit cœur tout de ténèbres empli lorsque j’appris l’existence du projet War for the Overworld : au début humble projet de suite fan-made de Dungeon Keeper 2 sous forme d’hommage, puis le lancement fin 2012 d’une campagne Kickstarter largement couronnée de succès avec une équipe agrandie, tout laissait présager la venue d’un digne héritier au simulateur de donjon que l’on sait. S’ensuivirent des versions Alpha, bêta et early access (payante) qui durèrent tout de même pendant un bon moment. Et le 2 avril 2015, sortie du jeu. Les développeurs ayant eu la gentillesse d’envoyer une clé Steam à la rédaction, je me lance sans tarder dans la construction d’un empire du Mal tout neuf.

Bon. Passons le fait que l’écran d’accueil affiche d’entrée de jeu un message d’excuse des développeurs façon «oui bon, c’est un peu de la merde tout est un peu pété mais on y travaille, désolé hein». Qu’une fois dans le jeu, les infobulles sont saoules et me disent des trucs du genre ceci est une case d’eau PLACEHOLDER_ PLACEHOLDER_ PLACEHOLDER_ selected:false(), ce genre de choses arrive. Les plantages bloquants sont une autre affaire, de même que les problèmes de pathfinding qui font faire n’importe quoi aux créatures et ennemis qui se promènent dans le donjon au point de se contenter de répéter à l’infini un aller-retour d’une salle à une autre alors qu’ils sont supposés exécuter une tâche, quand ils n’avancent pas bêtement dans un mur. Je prendrai en exemple cette mission de la campagne durant laquelle le donjon du joueur est supposé subir l’assaut d’une grande armée de nains vindicatifs… qui se perdent dans les couloirs au point d’oublier qu’ils sont supposés m’attaquer. Ou encore un bug dans la mission finale qui empêche carrément d’aller affronter le boss de fin. Bravo les mecs.

Quelques heures après la sortie du jeu, voilà donc les développeurs qui travaillent d’arrache-pied pour produire un à deux patchs correctifs par jour pendant une semaine pour corriger tout ça, mais n’arrivent tout de même pas à résoudre le framerate drop monstrueux que subit le jeu de façon apparemment aléatoire chez de nombreux joueurs (dont moi, et pourtant ma machine c’est pas du caca les copains !) ce qui est difficilement compréhensible quand on regarde le jeu qui…ben vous voyez quoi, c’est pas la folie graphiquement non plus, un jeu comme ça devrait avoir des exigences plutôt humbles en terme de configuration !

La bibliothèque des Ténèbres du Mal Malveillant

Le sort de Possession, toujours fun, qui nous permet de voir le donjon de l’intérieur à travers les yeux d’un humble sbire.

Premier constat: j’ai attendu, et attendu encore avant de faire cette review mais il faut se rendre à l’évidence : Malgré tout le temps qu’il a passé en early-access, War for the Overworld a été commercialisé inachevé: campagne finissable en une nuit, trois maps qui se battent en duel pour le mode Escarmouche, un mode Survie cassé et les bugs susmentionnés.

 

Sombre traversée des couloirs de la Redite

Quand le jeu daigne se laisser jouer, on a affaire de prime abord à une copie quasi conforme de Dungeon Keeper 2 : même gameplay avec un système de construction de salles basé sur des cases de terre à évider, le curseur qui représente la main de l’Underlord qui attrape créatures et objets et un donjon qui se peuple en fonction des salles que l’on y a construites. Même les premières missions de la campagne rappellent furieusement celle du prédécesseur, et jusqu’aux sbires de base qui sont grosso-merdo les créatures de Dungeon Keeper avec une skin différente. Les sorciers travaillent à la bibliothèque, les goblins qui pètent à l’atelier, les trucs volants iront explorer les environs en semi autonomie… je ne m’étendrai donc pas sur le sujet: hommage de bout en bout, WftO assume à fond et garde tout ce qui a fait le succès de son ancêtre.

On a cependant quelques nouvelles salles et créatures, dont les Bêtes. Ces dernières agissent en semi-autonomie, ont tendance à attaquer sans se soucier de leur survie, sont plutôt balaises et facilement remplaçables ce qui en fait une excellente chair à canon. Les Crackpots, genre de goblins alchimistes fous produiront des potions aux effets divers (gain d’expérience, invocation de trucs…), les guerriers squelettes ne sont plus produits par les cadavres des ennemis emprisonnés au cachot mais par les nécromanciens dans la Crypte, et quelques autres mécaniques de jeu rafraîchissantes.

Y'a du Rituel au milieu de mes artefacts et les icônes de potions ont la même couleur que celles des salles...

Tout ça est assez confus, pourquoi tous les types de recherches sont-ils mélangés ?

L’acquisition de nouvelles salles, sorts et objets se fait via une espèce d’arbre de compétences dans lequel on pourra dépenser des points au fur et à mesure que les cultistes / sorciers effectuent des recherches dans la bibliothèque du donjon. Ce dernier se divise en plusieurs catégories : les salles et leurs améliorations ; les sorts ; les rituels qui sont de gros sorts alimentés par les cultistes dans une salle spéciale, le sanctuaire ; les artefacts produits à l’atelier ; les potions produites dans le labo ; les artefacts construits à un endroit précis par les larbins mais qui ne sont pas des pièges, et tout au bout de l’arbre, une invocation au choix parmi trois créatures bourrines. Les trois branches de l’arbre sont sensées illustrer deux façons de jouer, offensive basée sur des créatures agressives, défensive basée sur les pièges et des invocations, et au milieu les pièces essentielles. En pratique, c’est un gloubi boulga d’icônes pas vraiment discernables et d’options de sorts et rituels passables ou trop orientés multijoueur compétitif pour trouver leur utilité dans une campagne ou une partie rapide. Sérieusement, pourquoi est-ce que les icônes de potions ont la même couleur que celles des salles, pourquoi l’icône du rituel qui fait travailler tout le monde plus vite est un mur qui s’écroule, pourquoi représenter les artefacts par des icônes de runes qui se ressemblent et ne veulent rien dire …?

Et le problème de l’arbre de recherches rejoint un autre un peu plus gênant, celui de l’interface bordélique. A ma gauche, une minimap illisible, à ma droite, une floppée de notifications inutiles qui s’enchaînent plus vite que sur le facebook d’un membre des One Direction. Au milieu, des onglets pleins d’icônes qui se ressemblent toutes et un tableau récapitulatif des créatures du donjon qui ne récapitule rien du tout.

 

Noyade dans les abîmes visqueuses de la déception

D’où problème : pour avoir rejoué à Dungeon Keeper 2 peu de temps avant WftO, je ne peux m’empêcher de penser que bon, quitte à avoir envie de jouer à Dungeon Keeper, autant jouer à Dungeon Keeper et qu’il ne sert pas à grand chose de refaire le même en un peu mieux (encore que certaines choses qui fonctionnaient dans DK2 ne marchent pas dans WftO, comme les créatures en garnison dans un poste de garde par exemple…) sans même essayer de corriger les problèmes de gameplay que pouvait avoir DK2 en 1999.

Non mais sérieusement, vous vous souvenez des batailles dans DK2 ? Des créatures agglomérées les unes sur les autres jusqu’à ce que ne soit plus visible que leur barre de vie au dessus de leur tête ? Ben là c’est toujours pareil.

Demander un peu de stratégie ou de microgestion, en 2015 ? Mais vous n’y pensez pas, ça dépasserait l’entendement ma bonne dame. Non, non, nous on fait ça à l’ancienne: on prend une bonne poignée de larbins, on les lâche là ou y’a du grabuge et on les regarde courir dans tous les sens, repartir en sens inverse pour aller chercher à bouffer, se gêner les uns les autres, les petits magiciens devant, les gros guerriers derrière qui leurs coupent la retraite, et on regarde tout ça se ridiculiser en regrettant de ne pas travailler pour le camp adverse. C’est ça le Mal !

"Gnaaah, poussez pas les larbins !"

Ça ressemble à la fosse d’un concert de [insérez le nom d’un groupe de rock populaire]: tout le monde se pousse pour taper la barrière, même si tout le monde sait pertinemment que seul deux gars au premier rang vont vraiment pouvoir la toucher.

Vous pensiez pouvoir connaître les valeurs d’attaque et de défense de vos larbins, et combien vous allez devoir les payer quand viendra le tant redouté Jour de Paye ? Ben non, toujours pas.

Et tout est comme ça, teinté en plus de cette impression tenace de tout devoir rusher, de ne plus gérer un donjon mais de disputer une partie de Starcraft 2, à qui bâclera tout le plus vite possible pour pouvoir envoyer le plus de ces bestioles aux couleurs ternes et au design désespérément plat à la face de l’adversaire le plus vite possible.

Et en plus ça rame.

War for the Overworld, bilan du mandat: Un jeu plein de bonnes intentions fait par un petit studio indé qui avait sans aucun doute très envie de bien faire; qui arrive à la fois à être trop peu ambitieux et à ne pas être à la hauteur de ses ambitions, pour un résultat qui laisse un sale goût dans la bouche. Le développement continue néanmoins, sûrement parce que c’est à la mode de sortir des jeux pas finis et de les patcher pendant un an. Je garde donc un peu d’espoir de pouvoir jouer un de ces jours à un jeu propre, bien poli et lustré comme il faut, qui rendra justice à son contenu et déploiera son vrai potentiel sans être pourri par des légions de bugs. Allez les gars, vous y êtes presque !

On aime


  • La voix du narrateur (la même que dans DK2, oui)
  • Un gameplay prenant malgré tout

On râle sur


  • Ça rame, ça plante, tant que ça en devient ridicule
  • Graphiquement à la bourre
  • Des créatures au design peu inspiré
  • DK2 avec de nouvelles textures mais les mêmes échecs
  • Une interface qui ne veut rien dire

Co-papa du blog, gribouilleur de profession et amateur de fromage, le Doude est un gamer au grand cœur qui a élevé le tourisme vidéoludique au rang d'Art. Troquant ses T-shirts d'obscurs groupes de Metal pour une chemise à fleurs, il parle à tous les PNJs, fait des screenshots des paysages juste parce que c'est beau et peut passer des heures à choisir quel pantalon mettre à son personnage pour qu'il soit assorti à son armure du Chaos +7.