Florian : Voilà bien longtemps qu’on n’avait pas accueilli le moindre Guest ! Depuis JonJon et son article sur les MUDs en fait ! Ces jeux avec des histoires mais pas d’images, ni de sons d’ailleurs ! On cherchait un singe suffisamment courageux pour gravir le cocotier et voilà que c’est Will Berard sur Google+ qui nous a proposé un loooooong article sur Max Payne 3. On lui dit merci !
Date de sortie: 18 Mai 2012
Genre: Third Person Shooter avec couverture et bullet-time
Plate-forme: PC, PS3, Xbox 360, testé sur 360
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Developpeur: Rockstar (Vancouver, New England, London et Toronto)
Editeur: Rockstar Games
Un ex-policier alcoolique avec un penchant pour des méthodes expéditives, une réticence manifeste à l’intégration multi-culturelle et une vie sentimentale foireuse, en France, ça ferait un bon ministre de l’intérieur. Dans le monde du jeu vidéo, ça donne Max Payne.
Si vous n’avez pas eu la chance de jouer a Max Payne (2001) et Max Payne 2: The Fall of Max Payne (2003), de deux choses l’une: soit vous n’en avez pas eu l’occasion, et c’est l’occasion de rattraper votre retard, soit vous n’avez pas d’intérêt pour le jeu (que ca soit en terme de gameplay, ou d’univers), auquel cas vous ne risquez pas d’en avoir pour celui ci.
Si vous tombez dans la première catégorie, petit résumé des épisodes précédents – Max Payne est peut-être le pionnier du TPS (ou “jeu de tir objectif” d’après Wikipedia), au sens ou il est sorti a une période dominée par les FPS, et a montré qu’il était possible d’exécuter un gameplay aussi intense à la troisième personne. Ce fut aussi le jeu qui a introduit le bullet-time au monde du jeu vidéo, au point que le début des années 2000 fut dominé par l’utilisation de ce qui devint vite un gimmick.
L’univers de Max (on peut l’appeler par son prénom. Trois jeux à cribler de balles des hordes de mecs qui l’avaient bien cherché, ça crée des liens) est celui du cliché très sombre du flic-qui-ne-suit-pas-les-règles, hanté-par-ses-démons, gna gna gna. Le petit plus produit des deux premier jeux était une histoire très au point (évidemment, dans cet univers, c’est pas non plus du Victor Hugo, mais au moins c’était bien fait) propulsée par un choix de narration avec des scènes d’intermission sous forme de comics qui doit beaucoup à Frank Miller (avant qu’il soit connu du grand public pour l’adaptation de Sin City).
Voilà pour les deux jeux précédents. Quid de celui ci ?
Toutes les cases sont cochées – c’est un TPS, il a du bullet time, et l’accent est mis sur la narration très noire. Le style BD des cutscenes a été abandonné vu que de nos jours on a les moyens de faire des cinématiques de qualité avec le moteur du jeu, mais de temps en temps, on a droit à une fragmentation de l’écran en panneaux, petit clin d’oeil aux originaux.
Un aparté – je suis un gros fan de Rockstar, principalement parce que je suis un gros fan des jeux sandbox, et que Rockstar est à ce genre ce que Joel Robuchon est au cassoulet – le parrain, le daron, le mec qui sait doser le ratio saucisse/lard comme un dieu. Du coup, j’ai acheté le jeu sans me documenter, pensant que Rockstar en avait fait un GTA-like, et quelle ne fut pas ma surprise de m’apercevoir que c’est un TPS linéaire – pas de saucisse ni de lard! En particulier quand la première mission se termine dans un parking et que j’attendais le moment ou on monte en voiture et explore la ville. Ben non.
En terme de gameplay, c’est nickel, rien à envier à Gears Of War, (qui est un peu le mètre étalon des TPS ces jours-ci). D’ailleurs la nouveauté du troisième volet, c’est que, en plus d’avoir repris le bullet time, Rockstar a jugé bon d’introduire un système de couverture, apparemment un concept qui, pour un jeu qui sort en 2012, est devenu indispensable.
Première ou troisième personne, les shooters se divisent à mon sens en deux catégories – soit le truc où on fonce et bourrine (ce qui est feune) du coup généralement avec une barre de vie conséquente, mais qui ne se régénère pas, soit, ce qui semble malheureusement être la norme, de Call of Duty à Gears of War, le truc où on passe pas mal de temps derrière un objet d’un mètre de haut, avec une barre de vie moins généreuse, mais qui se régénère.
Du coup, c’est là que ça clashe un peu. Les deux premiers Payne étaient à l’ancienne – on fonce dans le tas, si possible avec une plongée au ralenti qui permet de gracieusement fournir, un Uzi dans chaque main, un traitement d’acuponcture au plomb au dit tas. Bien sur on morfle un peu, mais on récupère vite des antalgiques (parce qu’en plus d’avoir un penchant pour la bouteille, Max a un petit problème vis a vis des pilules qui ferait passer Gregory House pour un mormon ascétique). Le systeme est repris dans Max Payne 3, mais avec une barre de vie bien moins conséquente (histoire d’inciter le joueur à rester à couvert)
Le bullet time se régénère vite, mais finalement on n’a que peu d’occasions de l’utiliser, puisque le shoot-dodge, manoeuvre iconique du jeu, se termine par une demi-minute ou Max, qui a vieilli un peu, doit ramasser son déambulateur, se relever… pendant laquelle on est à découvert face au reste des ennemis… qui eux aussi utilisent le système de couverture! Du coup on plonge parfois à découvert pour s’apercevoir que tout le monde est déjà planqué derrière une table. L’histoire se passant au Bresil, ça donne l’impression que Max essaye d’amadouer une bande de gangsters en leur montrant qu’il ferait un bon gardien de but.
On se retrouve du coup a utiliser la manoeuvre non pas parce qu’elle aide dans le jeu, mais juste parce que, soyons francs, elle a la classe.
Gameplay et graphismes sont ce qui se fait de mieux sur les génération actuelles – une mention spéciale aux environnements très travaillés, et destructibles – ce n’est pas un élément de gameplay comme dans Red Faction, juste une petite touche qui rajoute au cote cinématique du jeu.
L’arsenal d’armes est tout a fait décent, à ceci près que je n’ai pas eu l’impression d’une différence très significative entre les différent flingues, ils se valent à peu près tous, donc il y a peu de choix tactiques à faire – du moins dans la campagne solo. On a l’impression que c’est le nombre de balles qui compte plus que leur calibre ou la portée de l’arme ; ce qui est frustrant quand en bullet time il faut tirer 5 fois à l’AK-47 sur un mec, ce qui prend du temps, alors qu’une rafale de pistolet mitrailleur, même à longue distance, va plus vite. Petit point négatif – les quelques armes à lunette sont à toutes fins utiles impossibles à contrôler sur console, puisque la visée devient assignée au stick gauche. Impardonnable.
La campagne solo tient sur deux DVD sur 360. L’histoire tient la route – Max, sur le retour, décide de relancer sa carrière comme garde du corps d’une famille de riches et puissants à Sao Paulo, inéluctablement ça tourne au vinaigre, et du coup le cabinet d’acuponcture au plomb ouvre à nouveau ses portes. L’histoire est segmentée en chapitres, eux-mêmes divisés en checkpoints.
Un truc à dire, c’est que cette méthode, tant pour la narration que pour le gameplay, a un rythme impeccable. Même si c’est le modèle TPS classique (baston dans un endroit généreusement fourni en piliers, bureaux, poubelles, voitures et couvertures diverses, suivi d’un peu de marche à pied linéaire jusqu’à la prochaine baston, puis cinématique, nouvel environnement, et on recommence) il est très bien déguisé, et la progression est fluide, le côté répétitif et gimmick du modèle moins visible que dans d’autres TPS. Les passages scriptés le sont avec goût, et trouvent leur place naturellement dans le flow du jeu.
L’histoire est conforme à ce qu’on peut attendre de cet univers – oui, c’est cliché, mais c’est un parti pris, comme Red Dead Redemption ou LA Noire – c’est pas tellement qu’on pourrait en faire un bon film, mais qu’on voit que l’inspiration vient d’un paquet de bon films. Encore une fois pas comme dans d’autres TPS qui sont clichés au point d’en être kitsch (oui, quand je dis “d’autres TPS”, c’est Gears que je vise).
A noter que l’auteur de Max Payne 3 est Dan Houser, à qui l’on doit le scénario de Red Dead Redemption ainsi que celui de la majorité des GTA. Tout cela est porté par non seulement la voix, mais aussi la performance (via motion-capture) de James McCaffrey, qui prêtait sa voix à Max dans les deux premiers, et sert le personnage à merveille. (J’ai testé la VO, j’ignore si l’édition francophone a été doublée, et si oui, par qui) – on a notamment droit, alors qu’on joue, aux petits commentaires plein d’amertume de Max, qui en plus (qualité Rockstar oblige) ne se répètent pas, même si on rejoue le même chapitre plusieurs fois.
C’est bien, parce qu’on meurt souvent, et qu’on est obligé de refaire quelques passages un certain nombre de fois – je ne pense pas être une brèle en TPS, mais en difficulté normale, il y a déjà du challenge. Par contre, dans la lignée de ce qui avait été fait pour LA Noire, Rockstar nous aide gentiment – au bout de quelques essais, plutôt que l’insultant “Voulez vous diminuer la difficulté” (ou sauter la scène d’action pour LA Noire), le jeu vous offre subtilement un painkiller de plus, le petit coup de pouce qui permet de progresser sans être frustré. Il y a aussi, en plus du niveau de difficulté, trois niveaux d’aide à la visée (sur console, j’imagine qu’il n’y a pas lieu sur PC)
Un mot sur le multijoueur, parce que c’est là que risque de se trouver le gros de la durée de vie du jeu (forcément, contrairement à un sandbox, la campagne se finit plutôt vite). Rockstar nous offre un système très complet de niveaux et d’unlocks, avec des abilités en sus, plus différents modes de jeu assez intéressants.
On retrouve le meilleur de ce que CoD fait en terme de progression (tout en conservant un équilibre qui ne donne pas un avantage injuste aux niveaux élevés), voire mieux. L’idée de séparer l’XP (qui donne accès à une arme) des revenus (armes qu’il faut acheter), introduite dans Black Ops et reprise dans Assassin’s Creed est ici – donc il y a des choix à faire. Ceci est combiné au meilleur de ce que Rockstar sait faire, mais n’avait pas les jeux pour – je pense aux social club de Red Dead Redemption, et aux modes de jeu alternatifs qui permettent de varier les plaisirs.
Le jeu réussit le coup de maître d’offrir, dans une certaine mesure, du bullet time en multijoueur, un système non seulement inédit, mais physiquement impossible… En fait, il y a une logique très maligne qui ralentit uniquement votre personnage et les autres joueurs dans votre champ de vision. Il y a aussi un système de “crews” qui n’est pas juste un clan qui met un acronyme à côté de votre nom, il y a des bonus d’XP si on joue et aide les membres de son crew (c’était une des bonnes idées dans Syndicate – à la décharge de CoD, je ne sais pas si ce système est présent dans les derniers, principalement parce que je me refuse à rejoindre une communauté remplie d’adolescents qui, si jamais ils se prennent une balle, promettent de faire à ma mère des choses que l’église catholique reprouve).
Bref, si vous êtes férus de Max Payne et que de passer du New Jersey au Brésil ne vous pose pas de problème, le jeu vous plaira. Si vous aimez les TPS, il vous plaira aussi… Si vous n’êtes pas amateur de campagnes solo linéaires… il reste le multijoueur!
On aime :
- L’excellente facture du jeu à tout point de vue
- La qualité et la diversité du multijoueur
- L’atmosphère et l’histoire
On râle sur :
- Les temps de chargement (sur 360 du moins)
- Quelques problèmes d’interface (pas moyen de lancer une grenade avec un bouton, ou de sortir de couverture avec le bouton qui fait courir, les armes à lunette sur le stick gauche…)
- L’atmosphère et l’histoire (au bout d’un certain temps, le côté “oh, le bresil, c’est un contraste entre les riches et les environnements modernes et les favelas”, ponctué par la voix off de l’ex flic aigri sorti d’un polar, ça peut lasser)