Goodbye Deponia clôture la saga épique de Rufus et Goal. Après avoir condamné sa planète à être détruite, mais sans faire trop exprès, puis saboté sa dernière chance de la sauver, notre crétin clepto-sociopatho-pyromane de protagoniste est bien décidé à rattraper le coup et prouver à tout le monde que c’est lui, le héros de cette histoire stupide.
Éloge de l’incurie, ou la Fuck You I’m Awesome attitude
L’histoire du jeu vidéo est remplie de méchants de toutes sortes. Charismatiques ou ridicules, avec des personnalités torturées ou minimalistes, ils ont en commun cet amour du chaos, le mépris de la vie d’autrui et la fâcheuse habitude de faire souffrir les gens de leur entourage. Rufus est un peu comme ça, sauf que lui, il ne fait pas exprès. Aussi, les épisodes de Deponia ont tous en commun la façon dont ils commencent: un foirage monumental de la part de notre héros qui tente d’appliquer un plan d’évasion génial et qui finit en perspective de destruction apocalyptique de Deponia, la planète poubelle qu’il essaye de quitter avec acharnement. L’épilogue ne fait pas exception à cette règle, et se découpe en quatre parties (plus un tutoriel qui vous apprendra avec finesse et pédagogie comment utilise votre souris pour cliquer sur des trucs à l’écran… le tuto dans Deponia, c’est un peu un running gag qui se renouvelle à chaque épisode, en plus con) qui, cette fois, ne souffrent pas du syndrome de la fin bâclée. Beaucoup de lol, beaucoup d’absurde, quelques ornithorynques, des décors et animations plus fins que jamais, des personnages stupides et étonnamment attachants, pas de doute c’est bien Deponia et ça ne s’essouffle pas le moins du monde. Au contraire, l’intrigue avance assez vite pour un jeu du genre et bien qu’elle ne soit pas folle de complexité, m’a bien fait rire tant elle est bouffonne (la coquine). S’il n’y a toujours pas grand chose à dire sur le gameplay en lui même, déjà abouti et optimisé depuis le début des années 90, là où Goodbye Deponia surprend c’est par son rythme.
Je veux être Bailiff à la place du Bailiff
En effet, Deponia 3 est à l’image de son personnage principal: lunatique et prétentieux. On sent qu’il a envie d’être autre chose qu’un jeu d’aventure point n’ click, on sent qu’il aimerait bien être un épisode de dessin animé, ou un puzzle-game, voire encore l’un de ces jeux hyper-cinématiques faits d’une accumulation de QTE mis bout à bout, on sent qu’il a envie de décoller et de sortir de son cadre, certes intéressant mais ô combien limitatif. Avec tous ses minijeux, ses cinématiques, ses trucs et ses machins, il réussit à donner du rythme à un genre qui, traditionnellement, n’en a pas. Parfois au détriment de la jambe gauche du genre point n’ click, à savoir les énigmes (l’autre jambe, c’est l’histoire, et elle se porte plutôt bien) qui, à force de partir dans tous les sens, sont souvent trop faciles. Avec pour effet secondaire une progression plutôt rapide et la découverte permanente de nouveaux lieux, personnages et items avec lesquels interagir et l’enchaînement de moult dialogues et cinématiques, tout ça tient selon moi plus du dessin animé interactif que d’autre chose !
Un bon dessin-animé. Façon Cartoon Networks de l’ancienne époque ou Adultswim pour l’humour tellement enrobé de couleurs vives et d’incurie qu’on en oublie souvent à quel point il est sombre, infâme et parfois d’un goût pis que douteux.
Om nom nom.
Seule ombre au tableau, le troisième et dernier chapitre de cette saga, qui essaye de donner dans l’épique alors qu’un jeu point n’ click n’en a vraiment pas les moyens. Ce n’est pourtant pas faute d’essayer: l’équipe artistique de Deponia fait vraiment ici un excellent boulot, enchaînant les tableaux, jouant sur les angles de prise de vue pour donner un peu plus de dynamisme à l’action, le tout avec une qualité graphique constante, mais tout ça va vite, trop vite pour un jeu d’aventure. Quant au final… on n’en parlera pas ici, parce que le spoil, c’est pas le genre de la maison. Nous sommes des singes soigneusement rasés.